L’IFACI Challenge, un moment privilégié pour comparer ses pratiques en matière d’IA et tester la nouvelle version de GAIA

La 3ème édition de l’IFACI Challenge était l’occasion pour les participants d’explorer et de prendre en main des outils d’intelligence artificielle générative adaptés aux métiers de l’audit interne et du contrôle interne, avec bien sûr la nouvelle version de GAIA, le chatbot d’intelligence artificielle conçu par l’IFACI. Marie-Pierre Bailly, auditrice en organisation interne à la CAF du Rhône, et Nadège de Becquevort, directrice de l’audit, du contrôle interne et de la lutte contre la fraude d’in’li, reviennent sur cette journée à laquelle elles ont participé et sur ce qu’elle leur a apporté.

Après avoir travaillé dans différentes Caisses d’allocations familiales (CAF) depuis les années 90, Marie-Pierre Bailly a évolué vers les systèmes d’informations, mais s’est aussi consacrée au management, gérant jusqu’à plus de 100 personnes. Devenue responsable régionale d’un centre de ressources travaillant en coordination avec les 12 CAF de la région Auvergne-Rhône-Alpes, elle a rejoint en septembre 2024 la CAF du Rhône comme auditrice en organisation interne. « Je n’ai pas forcément un parcours classique d’auditeur », reconnaît-elle, « en revanche, je connais bien l’ensemble des métiers des CAF et j’ai un solide réseau, y compris du côté DSI ».

De son côté, Nadège de Becquevort a commencé sa carrière chez KPMG en audit financier classique, elle a ensuite souhaité « donner davantage de sens » à son travail, en rejoignant un service d’investigation de fraude financière. Pendant une dizaine d’années, elle a mené de nombreuses missions à l’étranger, avant de rejoindre le groupe Action Logement où elle occupe aujourd’hui, au sein d’in’li, le poste de directrice de l’audit, du contrôle interne et de la lutte contre la fraude.

L’IA : entre adoption précoce et prudence stratégique

L’IFACI Challenge, en réunissant une cinquantaine d’auditeurs et contrôleurs internes, a permis de réunir une grande diversité de profils, avec des expériences différentes concernant l’usage de l’IA. Marie-Pierre Bailly travaille dans un organisme qui forme ses managers à l’IA  et fait un peu figure de pionnière : « J’ai de l’appétence pour les outils et je les utilise beaucoup. L’IA m’intéresse, c’est aidant, c’est facilitant. » Elle utilisait déjà des solutions comme Copilot ,chatgpt ou Perplexity, « pour préparer mes missions d’audit, mais aussi sur la restitution, ce qui permet de gagner beaucoup de temps. Un gain defficacité d’autant plus appréciable que je suis seule sur mon poste d’auditrice à la CAF du Rhône ».

Chez in’li, l’approche se veut structurée mais prudente. « Nous travaillons encore sur l’implémentation de l’IA au sein de l’entreprise, et nous n’en sommes qu’aux balbutiements », explique Nadège de Becquevort. « L’entreprise a décidé de créer un groupe de travail dont je fais partie ». Particulièrement motivée par les enjeux de lutte contre la fraude, elle est depuis 2 à 3 ans à la recherche d’un outil d’aide à la détection de fraude, soulignant que « l’IA va rendre la fraude plus facile. Il faut donc impérativement que l’on s’arme avec des outils qui embarquent de l’intelligence artificielle. » Mais jusqu’à présent, aucun ne lui a semblé ni efficace ni pertinent : « Les éditeurs nous promettent monts et merveilles, mais j’ai un cahier des charges très précis et les solutions actuelles n’y répondent pas. »

Des motivations convergentes pour participer au Challenge

Pour Marie-Pierre Bailly, l’IFACI Challenge représentait une opportunité multiple. « J’avais entendu parler de GAIA et j’avais noté qu’il y avait des « agents » dans cette solution qui m’intéressent beaucoup », explique-t-elle. Au-delà de l’aspect technique, elle y voyait « l’occasion de rencontrer d’autres personnes qui ne sont pas de cette même branche sociale, de voir comment on travaillait ailleurs, de confronter les pratiques ».

Nadège de Becquevort partage cette soif d’apprentissage : « Je me nourris de tout ce qui peut se faire sur l’IA et notamment de ce que fait l’IFACI, qui nous apporte quand même beaucoup sur toutes les questions touchant à la profession. L’IFACI Challenge était l’occasion de voir le champ des possibles. » 

L’aspect pratique de la journée a particulièrement été apprécié, comme l’indique Marie-Pierre Bailly : « Nous étions dans des ateliers vraiment actifs. Donc chacun a pu tester directement, discuter des résultats et de la meilleure façon d’y parvenir avec les collègues. » Elle souligne également l’apport pédagogique : « J’ai aussi beaucoup apprécié qu’il y ait un facilitateur graphique. Cela aide à mémoriser ».

Pour Nadège de Becquevort, l’enrichissement est venu avant tout des rencontres : « J’ai d’abord eu l’occasion d’échanger avec beaucoup de personnes, toutes de ma profession, mais dans des entreprises très variées : des toutes petites comme des grosses structures, avec des personnes qui n’avaient quasiment jamais entendu parler d’IA et d’autres qui s’en servaient au quotidien. » Cette diversité s’est révélée « assez inspirante et rassurante à la fois ».

GAIA : une nette amélioration de l’outil dédié aux pros du risque

La nouvelle version de GAIA a particulièrement intéressé les participants. Marie-Pierre Bailly souligne notamment « la construction des matrices, sur le risque et le contrôle, et sur le fait que l’on puisse y associer les normes ». Elle apprécie le fait que « GAIA n’apporte pas une réponse toute faite mais fonctionne vraiment comme un assistant ».

L’approche interactive de l’outil séduit également : « Avec la construction de la matrice, par exemple, je rédige mon prompt et après, petit à petit, GAIA me pose des questions, me demande d’améliorer ma requête, d’affiner, d’aller plus loin. C’est très intéressant, parce que cela permet de rester intelligent. » Le tout sans faire une croix sur l’aspect sécurité : « GAIA est aussi intéressant en termes de sécurité puisque les requêtes et les résultats ne sont pas enregistrés. »

Nadège de Becquevort, qui connaissait la précédente version pour avoir participé à l’IFACI Challenge en 2024, observe une nette amélioration : « Cette nouvelle édition du Challenge, très orientée sur GAIA, m’a vraiment donné envie de l’utiliser. Elle est beaucoup plus aboutie ».

Des projets concrets d’utilisation

Toutes deux envisagent déjà des applications concrètes. Marie-Pierre Bailly compte utiliser GAIA « pour préparer mes missions d’audit, pour aller plus loin notamment dans la fiche de cadrage, dans la construction de ma grille d’analyse ». Elle l’utilisera aussi « pour les restitutions, pour les rendre plus pédagogiques et permettre de suivre la construction du raisonnement ».

Nadège de Becquevort prévoit elle une première utilisation assez prudente : « Notre première étape va être la rédaction d’une charte d’utilisation de l’IA dans l’entreprise. Et quel meilleur exemple que d’utiliser GAIA pour créer cette Charte ? » Elle envisage aussi son utilisation « pour les audits, les rapports d’audit et l’identification des risques », tout en soulignant un défi : « Le prompt est un art et il faut passer du temps à s’exercer, ce n’est pas si évident que ça. »

Une vision nuancée de l’avenir de l’IA dans l’audit

Les deux expertes portent un regard mesuré sur l’évolution de leur métier. Pour elles, l’IFACI Challenge 2025 aura permis de démontrer que l’intelligence artificielle, loin de remplacer l’expertise humaine, peut, au contraire, devenir un précieux allié pour les professionnels de l’audit, à condition de maintenir une approche réfléchie de ces nouveaux outils. Marie-Pierre Bailly voit ainsi dans l’IA « un formidable assistant » qu’elle utilise « tous les jours, mais qu’il faut utiliser en pleine conscience ». Elle insiste sur l’importance de l’esprit critique : « Je ne voudrais pas arriver à devenir une machine qui prompte et qui fait du copier-coller. Il faut toujours avoir conscience de ce qu’on attend de l’intelligence artificielle, de façon à pouvoir garder sa capacité danalyse ».

Nadège de Becquevort adopte une approche très prudente : « J’ai encore un peu de mal à me projeter, très sincèrement. » Elle anticipe néanmoins des évolutions significatives : « Il y aura une capacité à traiter des sujets en volume, nous serons moins sûrs de l’échantillonnage, mais sur une base quasiment exhaustive avec une vraie capacité à aller plus rapidement sur de l’anomalie, sur de l’atypique ». Mais elle aussi insiste : « Nous devrons toujours compléter nécessairement par un savoir-faire et une expertise, en gardant son esprit critique basé sur la connaissance du métier. »