60 ans de l’IFACI – « La certification IFACI fait partie intégrante de mon plan stratégique pour l’audit interne » Nicolas Grobelny, auditeur général de la Rawbank

À loccasion des 60 ans de lassociation, des adhérents de longue date nous parlent de leur parcours et de ce que lIFACI a pu concrètement leur apporter. Aujourdhui, Nicolas Grobelny, auditeur général de la Rawbank à Kinshasa, en République démocratique du Congo, évoque les grands défis du métier et les apports de l’IFACI, quil sagisse de ressources, de formation ou de renforcer la légitimité du travail des auditeurs.

Pouvez-vous nous parler de votre parcours et de votre rôle actuel ?

Nicolas Grobelny : J’ai tout d’abord commencé ma carrière au sein de plusieurs banques commerciales en Belgique, et ensuite au sein du département trésorerie d’une filiale du groupe Total, qui avait racheté le groupe belge Petrofina, dans la pétrochimie. J’ai travaillé ensuite pour une entité du groupe Toyota, Toyota Material Handling Europe, qui produit et distribue des engins industriels. Je m’y occupais d’abord de la politique des prix de transfert en Europe puis, quand tout a été mis en place, j’y réalisais aussi des missions d’audit interne au sein des entités de production et de distribution.

Et finalement, je suis venu au Congo en 2012.Ici, j’ai d’abord été gérant de la principale agence du réseau Rawbank. Je suis devenu ensuite responsable régional pour le Katanga, et ensuite d’une autre région où je devais réaliser des missions de prospection pour installer des agences, notamment dans le centre et le nord du pays. En 2017, j’ai rejoint l’audit interne. J’en suis devenu le responsable en janvier 2018. Au sein de la Direction, qui rapporte au Directeur Général et au Comité d’Audit, nous sommes aujourd’hui 29, dont une équipe de 6 auditeurs informatiques. 3 auditeurs sont aussi chargés des enquêtes internes. Les autres sont répartis entre les audits dans le réseau d’agences et les audits de processus transversaux au Siège.

Quels sont pour vous les grands défis de votre métier aujourd’hui ?

N.G. : Je citerais d’abord la communication : de l’audit vers les audités, et inversement – c’est-à-dire la collaboration des audités. Le but est d’assurer une communication fluide pour que les objectifs soient atteints, que les travaux se réalisent correctement et dans les temps.
Je citerais ensuite le changement. Parce que l’audit, c’est aussi souvent proposer un changement.Comme dans de nombreux domaines, il peut y avoir une résistance au changement, ou du moins une certaine méfiance. Selon l’expérience personnelle ou professionnelle de chacun, voir arriver un changement ou la proposition d’un changement sera plus ou moins bien accueilli, plus ou moins contesté. C’est là où les deux défis se rejoignent : il faut arriver à s’assurer de la collaboration, voire de la transparence de l’audité. Car évidemment, un audit peut parfois être perçu comme une remise en cause, pas uniquement des processus, mais de la façon de faire ou de la supervision. Celapeut rendre difficile la communication. Nous sommes certes censés apporter l’assurance, mais aussi formuler des recommandations pour assurer au plus tôt l’atteinte des objectifs. Si ces objectifs impliquent un changement, il faut que la communication passe bien.

Du côté des outils, de la technique, je pense aujourd’hui d’abord à l’IA, mais demain, on parlera d’autre chose, car au fond la question reste la même : est-il possible de faire encore mieux ? Et il y aura toujours au centre de ces réflexions l’aspect humain, avec la communication, la nécessité de convaincre, de collaborer, de se faire comprendre, qui nécessite de connaître le métier de l’autre et donc d’être formé, de maintenir ses compétences, de s’adapter. Ces aspects qui sont pour moi permanents et qui ne dépendent pas forcément des outils que l’on peut utiliser.

« Une certification de lIFACI consacre un effort et apporte de la légitimité »

Quelles sont les compétences clés que vous mettriez en avant pour exercer ce métier ? 

N.G. : Il est important, selon moi, de savoir s’adapter au changement, que ce soit sur les aspects technologiques autant que les aspects humains.À chaque mission, nous avons un interlocuteur différent qui peut réagir différemment à la mission qui se déroule. Soit la mission est vue comme un accompagnement, soit comme une enquête de police. Il faut s’adapter aux situations, chercher à apprendre, savoir s’adapter. Pour autant, il ne faut pas se contenter du statu quo, parce que c’est aussi ce qu’on attend de l’audit. Ce n’est pas juste de rappeler qu’il faut mettre un tampon bleu en haut à gauche d’un document. Auditer un processus ou une activité, c’est aussi s’interroger sur le fait que la procédure soit bonne : est-ce la pratique qui s’écarte de la procédure, ou la procédure qui ne correspond plus à un bon fonctionnement, compte tenu des objectifs stratégiques ou opérationnels et le niveau de tolérance aux risques approuvés par les organes dirigeants?

En quoi lIFACI vous apporte-t-il un soutien concret ?

N.G. : Je mettrai d’abord en avant les ressources, avec la base documentaire, pour aller voir par exemple s’il existe un programme de travail ou une approche qui pourrait être utile dans le cadre d’une mission. Toute équipe d’auditeurs ne peut pas avoir son propre service de méthodologie ou de recherche, et c’est un peu le rôle, pour moi, de cette base documentaire et de l’IFACI en général. Nous avons d’ailleurs commencé à utiliser GAIA, et il me semble que, comme Copilot, il s’agit d’un outil destiné à stimuler la recherche. C’est pour cela que c’est utile de disposer des références ou notes de bas de page qui permettent de vérifier les sources.

Les formations IFACI sont également un vrai plus : c’est à la fois une mise à niveau et un test de celle-ci. Enfin, depuis 2022, nous sommes en contact avec l’IFACI Certification. Comme certains peuvent le dire parfois en interne : l’audit vient nous auditer, mais qui audite l’audit ? Nous formulons des recommandations, mais est-ce que nous-mêmes, nous nous remettons en cause ? C’est cette remise en cause et la recherche de l’amélioration continue que permet une mission de certification.

Un conseil aux nouvelles générations : que diriez-vous à un jeune professionnel qui débute dans ce secteur ?

N.G. : Être curieux, chercher à toujours comprendre « pourquoi ? » et ne pas s’arrêter à ce qui est dit. Être sceptique ; faites vos propres recherches et renforcez vos compétences par des formations ou certifications et multipliez les missions ou expériences afin de pouvoir valider ce qui est dit et vous forger votre propre opinion.

L’esprit critique est important dans ce métier, ainsi que la remise en cause, afin de savoir si nos compétences sont toujours bonnes ou bien s’il faut nous améliorer et nous former. En réalité, il ne faut pas avoir trop de certitudes, alors que paradoxalement, nous sommes censés apporter de l’assurance.Il faut avoir un esprit critique et une remise en cause qui ne sont pas liés uniquement à des compétences techniques , mais aussi à sa capacité à communiquer avec l’audité. 

Dernier conseil : soyez adaptable. S’adapter aux changements est évidemment très important également, notamment lorsque ce changement vient de l’extérieur, comme avec l’IA. Cette capacité d’adaptation, c’est aussi ce que l’on attend d’un auditeur. C’est donner l’exemple pour apporter cette force de changement qui est aussi attendue de l’Audit Interne.

Un message pour célébrer les 60 ans de lIFACI ?

N.G. : Tout d’abord, joyeux anniversaire. Et merci une nouvelle fois à l’IFACI pour tous ses apports, que ce soit la base documentaire, les formations que l’on suit, les certifications… Échanger avec d’autres auditeurs est aussi évidemment un avantage. Malheureusement, je sous-utilise encore un peu cette opportunité d’échanges par manque de temps pour pouvoir me connecter à tel ou tel webinaire en direct. Ma seule vraie interaction est aujourd’hui avec les consultants et les certificateurs de l’IFACI Certification; elle fait partie intégrante de mon plan stratégique pour l’audit interne depuis plusieurs années.